Entretien avec S.E.M. Fareed YASSEEN, Ambassadeur d’Irak en France

Entretien avec S.E.M. Fareed YASSEEN, Ambassadeur d’Irak en France

Par Gaëlle Znaty, Responsable du Comité Moyen-Orient de l’ANAJ-IHEDN

L’année 2013 marque les dix ans de l’invasion américaine en Irak. Si le pays est désormais « libéré », les enjeux politiques, économiques et sociaux auxquels doivent faire face le peuple irakien sont nombreux. Pour aborder ces questions, l’ANAJ-IHEDN a eu l’honneur de rencontrer S.E.M. Fareed YASSEN, Ambassadeur d’Irak en France.

Gaëlle Znaty : Quel bilan dressez-vous des dix années qui se sont écoulées depuis l’invasion américaine de 2003 ?

Fareed Yasseen : Au tout début, il est vrai que c’était une invasion qui s’est transformée en occupation, mais il a résulté de celle-ci une libération. L’Irak, avant 2003, était occupé intérieurement. C’était aussi un pays qui était divisé. Le Kurdistan d’Irak était presque un Etat séparé. Le gouvernement central n’avait aucune présence au-dessus du 36ème parallèle. Par exemple, le ministère de l’Éducation ne payait plus les salaires des professeurs d’Arabe, ce qui fait que les kurdes qui étaient adolescents dans les années 90 parlent très peu l’Arabe, qui est la langue majoritaire du pays et la langue de gouvernance.

Très souvent, quand on discute de ce qui s’est passé en Irak ces dix dernières années, on y introduit l’attitude que l’on a vis-à-vis des États-Unis, et cela fausse le jeu.

Au bilan de ces dix années, il y a des choses qui sont remarquables et il y a des choses qui le sont beaucoup moins. Ce dont nous payons le prix aujourd’hui, ce n’est pas tant la chute du régime, la libération ou l’invasion, c’est plutôt l’accumulation d’erreurs qui se sont faîtes après, à la fois par les américains, par les irakiens, par les Nations Unies, et par la communauté internationale en général. D’ailleurs, je ne soustrais pas les pays arabes avoisinant du processus.

Il y a donc eu beaucoup d’erreurs. Et malgré cela, un certain nombre de points positifs. Après les élections de 2009, l’Irak est resté plusieurs semaines sans gouvernement. Lorsque la Belgique a connu le même problème en 2010-2011, on a comparé nos deux pays ! Pour que l’on compare l’Irak, qui, dix ans auparavant était encore gouverné par Saddam Hussein, à un pays démocratique comme la Belgique c’est qu’il s’est passé quelque chose. Ce n’est pas rien.

Pour vous donner un second exemple, chaque année, l’Agence Internationale de l’Énergie prépare un rapport, le World Energy Outlook, dans lequel elle consacre quatre ou cinq chapitres à un pays émergent considéré comme important. Il y a deux ans, c’était la Russie. L’an passé, c’était l’Irak. Cette année, c’est le Brésil. Que l’on traite l’Irak comme ces deux pays, ce n’est pas rien pour un pays qui a été en hibernation pendant une trentaine d’années.

Et j’insiste sur ce mot « hibernation » car l’Irak avait été, depuis sa création jusque dans les années 50, vraiment à la pointe de ce qui se faisait au Moyen-Orient. Nous avons été le premier pays à avoir été admis à la Société des Nations, avant l’Égypte. Nous avons été le premier pays de la région à avoir eu une compagnie aérienne. Nous avons été le premier pays arabe à avoir introduit la télévision, premier à avoir importé un « main-frame computer » . Pour l’anecdote, ces « main-frame » nous ont permis de comptabiliser et de gérer les factures d’électricité. Il y a là une certaine ironie, vu le manque d’électricité aujourd’hui.

Au terme de ces dix ans, il y a donc du bon. Il y a une pratique démocratique qui prend ses assises. On a eu trois élections, dont deux nationales, basées sur une constitution. Il y a eu un référendum constitutionnel, et nous venons d’avoir nos troisièmes élections régionales et provinciales durant les semaines passées. De l’avis des observateurs internationaux, dont ceux des Nations Unies, ce sont des élections qui se passent bien, avec les institutions nécessaires. En Irak, c’est peut-être une ironie, nous avons les meilleures forces spéciales et la meilleure commission électorale !

Néanmoins, nous subissons toujours les séquelles du passé. Elles pèsent lourd, elles suscitent toujours des différences entre communautés, elles nous demandent un surplus d’efforts puisque nos infrastructures ont dépéri. Ces problèmes sont encore renforcés par une natalité très forte. En dix ans, notre population s’est accrue de 20% à 30%, soit 5 à 6 millions de personnes, avec tous les besoins que cela génère pour des ministères tels que ceux de l’Éducation ou de la Santé.

G.Z : Pour ajouter aux défis de l’Irak, vous avez aussi un voisinage pour le moins complexe…

F.Y. : On pourrait le dire ainsi, mais c’est vous qui le dîtes ! Le bilan est donc mixte. L’Irak est désormais un pays démocratique. Cependant, avons-nous pu établir une bonne gouvernance ? Je vous dirais que non, mais le processus est en cours. Nous avons développé une manière de faire « à l’irakienne ». On essaie de trouver des solutions où il n’y ait ni gagnant qui gagne tout, ni perdant qui perde tout. Pour vous donner un exemple, si l’on considère une région mixte telle que Kirkouk, la communauté qui arrive en tête aux élections nomme le gouverneur, la suivante nomme le président du Conseil Régional, celle qui arrive en troisième position nomme le chef de la police. Cette pratique a pris un nom très négatif en Irak, on appelle ça muhasasa, la « part du butin ». Néanmoins, cela assure qu’il y ait une représentativité au sein du gouvernement.

G.Z: Pourriez-vous revenir sur les erreurs américaines, irakiennes et onusiennes que vous avez mentionné ?

F.Y : Quand les américains ont fait chuter le régime, ils ont fait, coup sur coup, des erreurs monumentales. La première erreur a été de ne pas protéger les frontières. À ce moment-là, se sont engouffrés tous les jihadistes de tous horizons et qui nous ont coûtés beaucoup de vies humaines.

Ensuite, ils n’ont pas protégé les institutions gouvernementales irakiennes qu’il aurait fallu protéger. Le cas du musée de Bagdad est le plus symbolique. Je ne suis pas un sympathisant du régime, j’ai même beaucoup œuvré dans l’opposition, mais quand j’ai vu la chute de la statue de Saddam, comme beaucoup d’irakiens, j’ai pleuré de joie. Deux jours plus tard, lorsque j’ai vu ce qui se passait au musée, j’ai pleuré de rage.

La troisième erreur fut de dissoudre complètement l’armée. Cette erreur a eu des conséquences monumentales parce que, au lieu d’utiliser l’armée irakienne pour assurer un peu de sécurité, ils se la sont mise à dos de la pire façon qui soit. Souvenez-vous que fin 2002, Saddam avait fait vidé toutes les prisons des criminels, soit disant pour prononcer une amnistie pour les délits politiques. En combinaison avec la dissolution de l’armée, cela a engendré une criminalisation des militaires et une militarisation de la criminalité. Il y a eu, en 2004-2005, un développement des kidnappings de médecins ou de gens influents qui, d’après les victimes, étaient de véritables opérations militaires.

On parle aussi beaucoup des impacts de la débaassification pour expliquer l’érosion de la compétence des administrations irakiennes, mais il faut rappeler que cette perte de compétences résulte d’un processus qui avait commencé, dès les années 60, avec la baassification. Je me souviens d’un cas particulier. En 1971, le gouvernement de Saddam a mis à la retraite cinquante-cinq professeurs de la faculté de médecine pour la seule raison qu’ils n’étaient pas baassistes. Beaucoup de ministères, dont celui des Affaires Étrangères, et d’administrations ont subi le même sort.

Une autre erreur, dont on parle peu, a été commise par les Nations Unies. Lorsqu’elles ont voulu organiser les premières élections, elles ont insisté pour mettre en place le même système que celui qui avait été utilisé en Afrique du Sud, c’est-à-dire une élection à la proportionnelle avec une seule circonscription. Il y avait des arguments en faveur de cette solution. Quand vous élisez une assemblée constituante, il faut que vous soyez aussi représentatif que possible. Dans ce cas-là, la proportionnelle s’impose. Cependant, il y a eu un vide en Irak pendant trente ans. Les gens qui voyaient les listes ne connaissaient pas les candidats. Au lieu de voter pour des partis et des idées, ils ont voté pour les noms qui leur ressemblaient le plus. Il y a donc eu une sorte de réflexe communautaire ou identitaire pour le vote. Dans ce contexte-là, il y a eu une action particulière d’Al-Qaida, qui a menacé les membres de la communauté sunnite de représailles s’ils participaient au vote. Ce qui fait qu’il y a eu des taux de participation très différenciés au sein de la première assemblée. Il y a eu 90% de participation chez les kurdes, au nord, environ 70% dans le sud, et une participation très faible dans le reste du pays, notamment à Mossoul. À cause de ce système électoral, le taux de participation déterminait le taux de représentation que l’on avait. Nous nous sommes donc retrouvés avec des communautés qui étaient mieux représentées que d’autres.

Dans leur sagesse, ceux qui ont été élus ont élargis le nombre des rédacteurs de la constitution pour inclure les gens qui n’étaient pas élus, dont le Vice-premier ministre, Salih Al-Mutlaq, qui n’a pas été élu en 2005. Pourtant, il a eu son mot à dire dans la rédaction de la constitution. Vous voyez donc que malgré les erreurs qui se sont accumulées, il y a aussi eu de grands succès.

La plus grande critique que l’on formule à l’égard de l’État irakien est de savoir pourquoi nous n’avons pas fait plus. Quand vous avez les outils nécessaires pour progresser, votre progression est arithmétique, vous accumulez. Le problème en Irak est que nous n’avions pas même les outils avec lesquels travailler. La législation n’était pas adaptée, les infrastructures n’étaient pas là. Prenez le cas de l’électricité. Pour faire de l’électricité, il vous faut du fioul. Pour faire du fioul, il vous faut des raffineries. Pour faire fonctionner les raffineries, il vous faut de l’électricité ! Au début, le progrès ne peut pas être linéaire. Une fois les outils nécessaires mis en place, il va s’accélérer et devenir exponentiel. C’est ce qui se passe aujourd’hui. Les progrès relatifs à la demande d’électricité sont importants.

G.Z : Avez-vous l’impression que les choix qui sont faits pour mettre en place ces outils sont rationnels ?

F.Y. : L’un des problèmes auquel nous sommes confrontés, c’est que nous avons un processus décisionnel assez lent. Pour expliquer à des français la caractéristique de notre régime, je dirais que nous sommes en quatrième République !

G.Z : Quelles perspectives s’ouvrent aujourd’hui à l’Irak ? Comment définir sa place et son rôle dans le concert des nations ?

F.Y. : Les perspectives c’est, qu’aujourd’hui, nous avons des perspectives ! En 2003-2004, qu’avions-nous comme perspectives ? Nous faisions partie de « l’axe du mal ». Et pas seulement pour les américains, pour presque tout le monde ! Nous étions assujettis à plus de 70 résolutions des Nations Unies sous chapitre sept, un record.

Pour revenir à nos perspectives, le rapport de l’Agence Internationale de l’Énergie est très parlant[1]. Nous nous préparons à un changement stratégique très important. Nous regardons désormais beaucoup vers l’Asie. Un récent article du New York Times expliquait l’évolution de l’implication chinoise dans l’industrie pétrolière irakienne. Les perspectives sont très favorables. En tant qu’ambassadeur d’Irak, je n’échangerais ma place avec aucun autre ambassadeur arabe.

Quant à la place et au rôle de l’Irak dans le concert des nations, je l’illustrerai par la réussite de la tenue du sommet de la Ligue arabe l’année passée à Bagdad. Personne ne pensait que ce sommet aurait pu se faire, mais nous l’avons réalisé, et il semblerait que l’organisation ait véritablement ébahi les participants.

Un autre exemple assez éloquent est celui de la diplomatie irakienne et de son évolution : celle-ci  était beaucoup enfermée avant 2003, et notamment sujette à beaucoup de restrictions. Aujourd’hui, nous possédons désormais 93 missions diplomatiques à l’étranger dont 70 Ambassades dans tous les continents du monde. De nombreux échanges sont réalisés. L’Irak a eu la présidence de la commission des droits de l’Homme. En somme, la diplomatie irakienne se dynamise beaucoup, et plus globalement, c’est tout à fait dans cette dynamique que l’Irak se construit.

G.Z : Depuis quelques années les relations entre l’Irak et l’Iran se sont améliorées et développées. Comment définiriez-vous les relations, la coopération et les enjeux à venir entre les deux pays ?

F.Y : Les relations sont très bonnes et les échanges entre les deux pays sont nombreux – échanges énergétiques, flux humains de pèlerins etc. On demande souvent quelle est l’influence de l’Iran sur l’Irak. Nul doute qu’une influence existe entre les deux pays, mais cela va de soit, l’Allemagne par exemple, a indéniablement une influence sur la France, de même que la France exerce elle aussi une influence sur l’Allemagne. Toutefois, nous ne pouvons pas parler d’autorité de l’Iran sur l’Irak. Par exemple, s’ils avaient cette autorité, nous n’aurions pas pu passer les accords de présence de troupes avec les Etats-Unis.

G.Z : L’Agence Internationale de l’Énergie prévoit, à l’horizon 2035, que l’Irak sera le 2ème exportateur mondial de pétrole. Comment le gouvernement compte-t-il préparer les politiques publiques qui seront rendues possibles par cette manne ?

F.Y : Tout d’abord, cette manne nous permettra de dépenser de l’argent pour la reconstruction du pays. Je me souviens d’un échange entre un haut dirigeant irakien et un chef d’entreprise français, qui lui disait que l’année 2012 serait difficile en termes économiques pour l’Irak, l’année 2013 s’améliorera, puis en 2014, l’économie reprendra vraiment. Ainsi, dans les années à venir – sauf si nous assistons à une chute accrue du prix du pétrole – l’Irak va voir sa situation économique nettement s’améliorer, et les projets d’infrastructures essentiels pourront reprendre. Cela dit, ces projets de construction et en particulier dans l’industrie pétrolière ne sont pas générateurs d’emplois, et il nous faudra donc redynamiser le pays par un autre biais, notamment en ravivant l’économie privée pour générer des emplois. Un enjeu qui ne m’effraie pas puisque, rappelons-le, l’Irak se localise au cœur de nombreux axes de communication cardinaux pour la zone.

Je peux citer l’exemple de projets défendus par le Ministre des transports, de lignes ferroviaires qui iraient du Nord au Sud et de l’Est à l’Ouest, et également un « canal sec », soit une ligne de chemin de fer consacrée aux marchandises qui irait du Sud de l’Irak à la Méditerranée, de manière à complémenter le canal de Suez.  En somme, une présence sur les routes de transports, avec une main-d’œuvre relativement bien qualifiée : soit un ensemble de facteurs favorables pour que l’Irak devienne un centre de production, à l’image de Taiwan, ou comme l’est aujourd’hui la Thaïlande. D’autant plus que l’Irak a des ressources qui permettraient de générer une activité touristique très importante – je rêve d’ailleurs de faire partir Nicolas HULOT en Irak !

G.Z : On a pu constater des tensions entre le gouvernement central et le gouvernement régional du Kurdistan sur la gestion et l’exploitation de la ressource pétrolière. Comment résoudre ces problèmes et répondre aux enjeux économiques et politiques qui en découlent ?

F.Y : Les enjeux économiques et politiques peuvent disparaître tout simplement en faisant marcher la Constitution ! Il faut savoir qu’il y a eu une sorte de détente entre le pouvoir central et le pouvoir régional ces dernières semaines. Un exemple assez éloquent de cette détente est la tenue d’un conseil des ministres à Erbil tout récemment car voulu par le Premier Ministre et a constitué un message très fort. Il me semble que c’est par le consensus et en pratiquant ce scénario déjà amorcé – s’assurer qu’il n’y ait ni grand gagnant, ni grand perdant-  que nous arriverons à atteindre nos objectifs et à relever nos défis.

G.Z : La sécurité intérieure demeure l’un des principaux problèmes du pays. Les politiques de sécurité intérieure commence-t-elle à porter ses fruits et que reste-t-il à faire pour revenir à  une situation normale ?

F.Y : Oui et non. Si l’on regarde les chiffres au cours des derniers mois, il y a eu effectivement une augmentation des taux de victime, mais cela est essentiellement dû aux phénomènes régionaux. N’oublions pas la présence d’Al-Qaida en Irak, d’Al-Qaida en Syrie et de leurs interactions. Nous avions d’ailleurs remarqué il y a un peu plus d’un an, que dans certaines régions en Irak, les cadres moyens d’Al-Qaida étaient des syriens partis en Syrie au début de la révolte, et nous avons pu faire état dans ces régions d’une baisse de la violence –  par exemple la province de Diyala.

À présent, je pense qu’il nous faudra le soutien, l’appui et la coopération, non seulement de l’ensemble du pays, mais aussi des grandes puissances, notamment la France, pour le développement de nos forces de sécurité intérieure ainsi que pour le développement de nos services de sécurité et de renseignement, car ils sont essentiels pour assurer la paix du territoire.

G.Z : Le climat des affaires reste difficile du fait de l’insécurité. Quelles sont les actions du gouvernement pour attirer les entreprises en Irak ? Quels sont les attentes et les objectifs visés ?

F.Y : Je pense que pour le moment, ce n’est pas que l’insécurité qui gêne, mais c’est surtout la lourdeur administrative héritée des méthodes de travail de l’ancien régime. Nul doute que des efforts significatifs ont été réalisés pour faciliter le travail des hommes d’affaires et des investisseurs étrangers en Irak – à titre d’exemple, le processus d’octroi de visa est très facile. Une des difficultés qui persiste est que nous souffrons encore du fait que notre secteur bancaire a encore besoin d’être plus développé, et je pense d’ailleurs que c’est un domaine dans lequel les compagnies françaises pourraient agir.

G.Z : La population irakienne a beaucoup souffert depuis de nombreuses années. Quels sont aujourd’hui les défis à relever pour offrir de nouveau une vie décente aux irakiens ?

F.Y : À part l’insécurité, qui dans une très grande partie du pays est un problème relativement résolu – au sud, dans certaines petites villes et surtout au Kurdistan- les problèmes des irakiens sont les mêmes que ceux de leurs voisins moyen-orientaux.

Parmi ces défis communs, je peux citer l’exemple du développement du secteur privé, qui doit être une priorité pour l’Irak.  En 2003, le pays avait un secteur privé vraiment atrophié, mais petit à petit, nous assistons effectivement à un développement de certaines entreprises irakiennes, notamment dans les secteurs hôtelier, BTP et pétrolier.

G.Z : Le conflit syrien dure depuis deux ans, quelles sont vos craintes pour la stabilité de l’Irak ? Quelles solutions le gouvernement irakien souhaite-t-il voir mises en œuvre ? Existe-t-il un risque de voir l’Irak gravement impacté par le conflit syrien ?

F.Y : Nous sommes tous impactés et ce qui se passe en Syrie est une tragédie. La position de l’Irak vis-à-vis de la Syrie est lue par 2 éléments : tout d’abord par ce que nous avons vécu comme expérience propre ; ensuite par notre souci pour nos voisins syriens. Depuis le début du conflit, nous avons dit que le peuple syrien devait pouvoir être libre de son sort, et que nous étions contre toute intervention étrangère et contre la militarisation du problème.

Par ailleurs, il faut savoir que nous avons sur notre territoire un nombre important de réfugiés syriens, d’ailleurs peut être moins important que celui que l’on trouve au Liban, sans doute car la densité de population à la frontière du pays n’est pas la même. Mais il y a aussi un élément important à prendre en compte qui est que les gens venant se réfugier de l’autre côté de la frontière ne se dirigent pas vers les institutions publiques, mais souvent vers leurs clans, tribus ou familles les plus proches.

Et sur cette question des diverses communautés syriennes pour laquelle l’Irak est très impacté, nous souhaiterions éviter une partition de la Syrie sur une base ethnique comme cela avait pu être proposé. Il faut à tout prix sauvegarder l’unité syrienne, car tous les syriens, peu importe leur communauté d’origine ont cette « syrianité » commune.

G.Z : Les tensions confessionnelles entre chiites et sunnites au Moyen-Orient semblent menacer de conflits graves. Comment l’Irak compte-t-il résoudre sa problématique confessionnelle ?

F.Y : « En famille », sans plaisanterie aucune car il faut bien comprendre que l’identité irakienne va au-delà des familles, des clans, des tribus.



[1] Le World Energy Outlook prévoit que l’Irak sera, à l’horizon 2035, le deuxième plus gros exportateur de pétrole au monde.

Gaelle Znaty
Responsable du Comité Moyen-Orient de l’ANAJ-IHEDN
Séminaire Grandes Ecoles – 2013
moyen-orient@anaj-ihedn.org
www.anaj-ihedn.org

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