La criminalité en col blanc n’a pas de frontière


La criminalité en col blanc n’a pas de frontière

Cet article vous est proposé par le Comité de Défense économique en introduction à la conférence du 22 mai 2013 sur le thème du « Géostratégie du crime : crises et crimes financiers à l’heure du chaos » lors de laquelle Jean-François Gayraud, Commissaire divisionnaire spécialiste du crime organisé et du crime en col blanc interviendra en sa qualité d’essayiste. N’hésitez pas à réagir en nous contactant à l’adresse : defense-economique@anaj-ihedn.org

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Définie par Edwin Sutherland en 1939, le crime en col blanc est « un crime commis par une personne respectable, de statut social élevé et dans son cadre professionnel». Dans les années 1970, l’absence de violence physique, remplacée par la tromperie, vint préciser la définition de ce crime. Ainsi, si les affaires Landru, Capone, Maddoff ou Kerviel entraînèrent des dégâts considérables, seules les deux premières furent sanguinaires. À l’heure où les frontières de la Finance n’existent plus et où les nouvelles technologies de l’informatique donnent des pouvoirs prodigieux à une personne, force est de constater que cette criminalité dépasse nos repères conventionnels Dans l’histoire de cette criminalité, il est à noter que les périodes de crise ou de récession sont propices au développement de celle-ci : les individus sont plus vulnérables et les détournements d’argent et autres maquillages de comptes sont en recrudescence (1987, 1991 et 2001). Mais quel serait le portrait type d’un criminel en col blanc ? Quels sont les liens avec la cybercriminalité ? Quel est le rôle d’INTERPOL face à cette criminalité ?

Le portrait type d’un criminel en col blanc

En premier lieu, le criminel en col blanc est le plus souvent un homme. Ainsi, en France plus de 80% des personnes condamnées pour délinquances économiques et financières sont de sexe masculin. Notre criminel en col blanc est souvent issu des classes moyennes ou supérieures et est presque toujours fortement diplômé. Par ailleurs, l’escroc financier a pour habitude  d’être apprécié de son entourage et de sa hiérarchie. Le délinquant économique est souvent un professionnel reconnu, qui travaille de nombreuses heures et prend peu de vacances. Mais, notre criminel de haute volée est avant tout une victime du système, du moins, c’est ainsi qu’il se définit la main sur le cœur devant juges et médias. Souvent bon acteur, notre « Robin des bois » de la Finance, en apparence, est enfin très habile pour échapper à une peine sévère ayant les moyens financiers de s’entourer d’excellents plaideurs pour convaincre le juge. Coté opinion publique, il semblerait que son costume cintré continue de « passer mieux » à la télé que celui du voleur à la tire, et lui permet de mieux se protéger des foudres populaires…

La cybercriminalité, l’inévitable des criminels en col blanc

La cybercriminalité désigne l’ensemble des infractions pénales qui sont commises via les réseaux informatiques, notamment sur le réseau Internet. La lutte contre la cybercriminalité se heurte parfois à des obstacles en raison du caractère vaste des réseaux informatiques, de la rapidité avec laquelle les infractions sont commises et de la difficulté à rassembler les preuves. À ce titre, les infractions financières sont étroitement liées à la cybercriminalité. La lutte contre les délits financiers, caractérisés par leur rapidité d’exécution et leur opacité, est tout aussi difficile que celle contre la cybercriminalité. Au-delà de ces aspects constitutifs, c’est bien l’ampleur de ces phénomènes qu’il faut considérer, car en agissant au sein des secteurs bancaires et financiers internationaux, tant officiels que parallèles, tous les pions de l’échiquier économique du particulier à l’Etat sont touchés. Ces phénomènes sont ainsi responsables de pertes considérables aux économies nationales et aux sociétés toutes entières.

Cependant, contrairement à ce que laissent suggérer les médias, 60% des cyberattaques dans le monde ne proviennent pas de la Chine, mais des États-Unis. Quelle prévention et quels moyens de lutte faut-il alors mettre en œuvre ?

Un certain nombre de facteurs rendent cependant très difficile, voire impossible, la localisation des avoirs illicites ou d’origine criminelle. Ces facteurs sont liés aux différences qui existent entre les pays en matière de législation nationale, d’application des accords internationaux et de niveau d’expertise des autorités chargées des enquêtes et des poursuites judiciaires. Face à ces défis transnationaux auxquels sont confrontés les services chargés de l’application de la loi, INTERPOL a pour rôle au niveau international de :

• Développer l’échange d’informations entre pays membres par l’organisation de groupes de travail régionaux et de conférences ;
• Dispenser des formations afin que les participants acquièrent et gardent un niveau professionnel élevé ;
• Coordonner et appuyer des opérations internationales ;
• Dresser une liste mondiale d’officiers de contact joignables 24 heures sur 24 pour les besoins des enquêtes relatives à des affaires de cybercriminalité ;
• Apporter une assistance aux pays membres en cas de cyberattaque ou dans le cadre d’enquêtes sur des affaires de cybercriminalité, en mettant à leur disposition des services en matière de recherche et de bases de données ;
• Etablir des partenariats stratégiques avec d’autres organisations internationales et avec des organismes du secteur privé ;Détecter les nouvelles menaces et communiquer aux pays membres les renseignements recueillis ;
• Mettre à disposition un portail Web sécurisé permettant d’accéder à des informations et à des documents présentant un intérêt opérationnel.

Le meilleur outil reste néanmoins la prévention, puisqu’en sensibilisant et responsabilisant, elle permet à chacun de devenir acteur dans cette lutte.

Marc Cazabat
60e session –  Lyon 2008, Responsable du Comité de Défense économique
&
Emmanuelle Siorac
74e session – Aix-en-Provence 2012, Membre du Comité de Défense économique

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