UNE INTRODUCTION AU FRANC CFA

 

Auteur : Charles NEVEU, membre du comité Afrique des Jeunes de l’IHEDN

Relecture par le pôle publication de l’association

 

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Ce texte n’engage que la responsabilité de l’auteur.

Les idées ou opinions émises ne peuvent en aucun cas être considérées comme l’expression d’une position officielle.

 
Monnaie issue de la période coloniale et dotée de mécanismes particuliers, le franc CFA reste soixante-quatorze an après sa création, une monnaie source de controverses : symbole du colonialisme et de la « Françafrique » pour les uns, désirable outil de stabilité monétaire et de lutte contre l’inflation pour les autres, mais qu’est-ce que le franc CFA ?
 

Une monnaie intrinsèquement liée à l’histoire coloniale de la France

 
Le franc des Colonies françaises d’Afrique (CFA) est institué au lendemain de la Seconde guerre mondiale, en 1945. Néanmoins, c’est dès 1939 que la Zone franc émerge à travers la signature d’un décret visant à assurer le protectionnisme de la France sur ses colonies afin de d’éviter la fuite de capitaux vers l’étranger.
Avec les indépendances des anciennes colonies dans les années cinquante et soixante, la zone perdure tout en évoluant géographiquement avec le retrait de certains Etats (Guinée, Mauritanie, Madagascar…) et l’adhésion d’autres (Guinée-Bissau, Guinée équatoriale).
Renommé une première fois, l’acronyme CFA désigne aujourd’hui Communauté financière africaine (bien que son sens ait changé, la persistance de l’appellation Franc CFA peut sembler constituer un point de tension inutile).
Aujourd’hui, la Zone franc représente environ 160 millions d’habitants. Elle associe 15 Etats africains et la France organisée en trois blocs distincts dont deux unions monétaires, chacun étant doté de son propre franc CFA (non interchangeable)[1] et banque centrale :
L’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) comprenant le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo.
La Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) englobant quant à elle le Cameroun, la République centrafricaine, la République du Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale et le Tchad.
Enfin, l’Union des Comores constitue le quinzième État membre de la Zone franc à titre individuel avec son franc comorien.
 

CARTE DE LA ZONE FRANC (Wikipedia)


 

Les principes directeurs du franc CFA

 
Le franc CFA est une monnaie dotée de trois caractéristiques principales selon ses conventions de coopération monétaire.
Une parité fixe avec l’euro (1 franc CFA = 0,00152 euro). Cela signifie que la valeur du franc CFA fluctue en fonction de celle de l’euro sur le marché des changes.
La convertibilité illimitée garantie par le Trésor français en contrepartie d’une centralisation des réserves de change.
La liberté de transferts intra zone, aussi bien des transactions commerciales que des flux de capitaux.

Une monnaie aux bénéfices contestés : l’avenir du franc CFA en question ?

 
Un certain nombre de critiques se font entendre à l’égard du franc CFA comme celles de l’économiste togolais, Kako Nubukpo. Selon celles ci, la Zone franc ne servirait que les intérêts de la France et les élites africaines et favoriserait une fuite des capitaux.
L’avantage invoqué de la Zone franc et de garantir une stabilité du franc CFA et une faible inflation des économies membres : alors que le taux annuel moyen d’inflation en Afrique subsaharienne était de 11,0 % en 2017, celui des États de la Zone franc était à 0,8 %)[2].
Il est vrai toutefois que le rattachement à une monnaie forte comme l’euro et la rigidité provoquée par la parité fixe n’encourage pas la diversification des économies fondées sur l’exportation de produits primaires. Rendant ceux-ci moins compétitifs et favorisant de ce fait l’importation de biens manufacturés depuis l’étranger.
Par ailleurs il est possible de constater que la Zone euro n’a pas eu d’effet sur l’intégration communautaire par les échanges : en 2016, les échanges intracommunautaires ne représentaient que 11,6 % du total des échanges de l’UEMOA et 3 % en CEMAC[3].
Enfin la présence d’administrateurs français siégeant au conseil des trois banques centrales de la Zone franc constitue un point nourrissant les critiques.
Différents projets d’alternatives à la Zone franc ont été proposés comme une monnaie unique de la Communauté Economique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) dénommée “’ECO”, dont l’entrée en vigueur est prévue pour 2020. D’autres projets moins aboutis demeurent à l’étude tels que la dollarisation ou encore le retour à des monnaies nationales.
 
 
 
 
[1] Le franc CFA de l’UEMOA et de la CEMAC ont la même valeur de parité avec l’euro mais restent deux monnaies distinctes, non interchangeables.
[2] Banque de France, Rapport annuel de la Zone franc 2017, 8 octobre 2018, p.11.
[3] Les dernières données sur le commerce intracommunautaire remontent à 2016, Ibid, p.57.
 
 
 

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